Le GRIP et la crise de l’école

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Le texte de référence pour l’adhésion au GRIP datait de 2011. Notre dernière Assemblée Générale a été l’occasion de le réactualiser tout en rappelant les positions de notre association sur la crise de l’école.

Si cette analyse vous semble pertinente, n’hésitez pas à nous joindre, voire nous rejoindre si affinités. Nous ferons le point sur nos différents projets dans un prochain billet d’actualité.

POSITIONS DU GRIP SUR LA CRISE DE L’ÉCOLE

ET LES MOYENS DE S’EN SORTIR

(Texte de référence pour l’adhésion au GRIP)

Origine principale de la crise

Depuis sa fondation en 2005, le GRIP situe l’origine principale de la crise de l’école dans le délitement des programmes, en premier lieu des programmes du primaire.

Amorcé dès les années soixante, accentué réforme après réforme, à peine corrigé ces derniers temps, ce délitement a en effet rendu de plus en plus aléatoire la constitution de savoirs rationnels. Il a ainsi compromis la possibilité pour la masse des élèves d’accéder à la culture élargie qui conditionne la réussite ultérieure des études.

En conséquence, le GRIP voit dans la reconstruction de programmes du primaire riches, cohérents et progressifs la priorité des priorités et la condition nécessaire d’une vraie démocratisation de l’enseignement.

La reconstruction des programmes

Dans cette œuvre de longue haleine, le GRIP s’appuie sur les programmes de l’École française, programmes quasiment invariants de 1882 à 1945 et dont il convient, par un examen critique attentif, de tirer le meilleur parti dans les conditions actuelles.

Il s’appuie aussi sur le riche héritage pédagogique légué par les fondateurs de l’Instruction publique (Buisson, Compayré, Kergomard, Laisant etc.) qui ont fait la synthèse internationale des procédés d’enseignement les plus performants (object lessons, méthode des Normal Wörter, calcul intuitif par exemple).

Il garde en même temps présentes à l’esprit les critiques faites par des pédagogues – Freinet entre autres – qui ont vu les limites et les défauts (nationalisme, utilitarisme, caporalisme) de ce qu’on a appelé l’École de la République.

Il s’inscrit dans la tradition qui consiste, sans céder aux modes, à doter chacun des éléments pérennes de savoir et de culture permettant de suivre les avancées de la connaissance.

Eu égard aux principes qui doivent guider l’écriture des programmes, il fait sienne la déclaration des instituteurs syndicalistes de 1905 :

« Notre enseignement n’est pas un enseignement d’autorité. Ce n’est pas au nom du gouvernement, même républicain, ni même au nom du Peuple français que l’instituteur confère son enseignement : c’est au nom de la vérité. Les rapports mathématiques, les règles de grammaire, non plus que les faits d’ordre scientifique, historique, moral, qui le constituent, ne sauraient dès lors être soumis aux fluctuations d’une majorité. »

Pour une véritable démocratisation

Par démocratisation, le GRIP entend l’accès de tous les élèves dès l’école primaire à des contenus rationnels et cohérents définis par des programmes au moins nationaux.

Le GRIP s’ était fixé comme objectif la refondation de l’Instruction publique telle que celle-ci était définie dans l’article Instruction publique du Dictionnaire de pédagogie et d’Instruction primaire de Ferdinand Buisson :

« L’instruction primaire, telle que la définit la loi du 28 mars 1882, n’est plus cet enseignement rudimentaire de la lecture, de l’écriture et du calcul que la charité des classes privilégiées offrait aux classes déshéritées : c’est une instruction nationale embrassant l’ensemble des connaissances humaines, l’éducation tout entière, physique, morale et intellectuelle ; c’est la large base sur laquelle reposera désormais l’édifice tout entier de la culture humaine. Cette instruction nationale est obligatoire pour tous ; elle est donnée à tous aux frais de l’État, qui l’a érigée en service public et gratuit ; elle est laïque ; c’est-à-dire qu’elle est soustraite à toute ingérence de l’Église et qu’elle ne porte plus le cachet de confessionnalité qu’avait voulu lui imprimer la loi de 1850. Un système de bourses nationales, qui se développera de plus en plus à mesure que les ressources budgétaires permettront de l’étendre, ouvre aux plus capables l’accès gratuit de l’enseignement primaire supérieur, de l’enseignement secondaire, de l’enseignement supérieur, et tend à faire une réalité de ce principe républicain de l’égalité du point de départ et de l’accessibilité de tous à toutes les fonctions sociales. »

Les atteintes portées aujourd’hui à la liberté scolaire menacent « cet idéal d’instruction nationale obligatoire pour tous », déjà ébranlé par la détérioration des conditions d’enseignement et l’invasion de considérations idéologiques phagocytant les contenus disciplinaires. La véritable laïcité réside maintenant dans la rationalité des contenus de programmes au moins nationaux, à l’écart de toute option idéologique particulière ou d’État, quelle que soit la forme d’ instruction choisie par les parents.

C’est seulement sur cette « large base » que peuvent s’ouvrir au niveau secondaire, dans le cadre d’un enseignement public ouvert à tous, des voies diversifiées adaptées aux goûts, aux objectifs, aux capacités d’assimilation des élèves, permettant à chacun d’eux d’atteindre le meilleur niveau de formation possible et, par là-même, l’élévation générale du niveau culturel. La référence au passé n’exclut pas l’innovation, elle exige, au contraire, selon la perspective de Buisson, d’intégrer les éléments éprouvés au plan international par les pédagogues contemporains.

Reconstruction des programmes, démocratisation réelle, tels sont les principes inséparables qui gouvernent l’action du GRIP. À déroger à l’un ou à l’autre, on ne saurait se prévaloir d’une quelconque « défense de l’instruction ».

S’y ajoute l’impérieuse et urgente nécessité d’une réforme de la formation des maîtres et des professeurs visant à leur permettre de maîtriser l’enseignement des contenus riches, cohérents et progressifs qu’ils auront à transmettre.

Le GRIP se prononce pour le maintien et le développement, dans le cadre d’un enseignement démocratique, de structures scolaires spécialisées dans l’accueil des enfants handicapés, enfants que des coupes budgétaires conduisent à abandonner aujourd’hui à leur sort, sans suivi qualifié, sous l’alibi indigne d’une « égalité » de pure forme.

Texte adopté en assemblée générale, Décembre 2021